Et voilà. Il est temps de clore cette décennie que personne, en dix ans, n’a réussi à nommer (Les 2000? Les Zéros?). Pour ce faire, je vous propose deux derniers classements cinéma (après j’arrête, promis). Mes dix films préférés de la décennie, bien entendu. Mais avant cela, un autre Top Ten: non pas les pires films de la décennie, parce que, n’étant pas un grand spécialiste de la série Z, j’en serai bien incapable, mais tout simplement les plus outrageusement surestimés, car comme vous le savez, je n’aime rien tant que tirer à bout portant sur des croûtes que l’univers entier tient pour des chefs d’oeuvres impérissables.
Alors sans plus tarder, voici mon classement des films les plus gênants de ce dixième de siècle, que nous appellerons le Top Eric Rohmer, en hommage au grand réalisateur de films chiants qui nous a récemment quitté.
10. Inglourious Basterds
Quentin Tarantino est indéniablement un grand cinéaste, mais c’est aussi un attardé, et l’un des artistes les plus exagérément encensés du monde du cinéma. Mon avis sur la question.
9. La Vie des Autres
Oscar du meilleur film étranger, César du meilleur film étranger, et une soixantaine de prix internationaux
Un cyborg de la Stasi espionne durant quelques semaines deux insupportables bobos. Forcément, il se met à lire Brecht, entend par inadvertance une sonate au piano qui lui file la chair de poule, et le voilà transformé illico presto en Bisounours héroïque épris de liberté. Au delà de sa naïveté, un film aussi mécanique, impersonnel, atone, et sans surprise que le régime qu’il entend dénoncer.
8. Babel
7 Nominations aux Oscars, Golden Globe du meilleur Film, Prix de la Mise en Scène Cannes 2006
Extrait choisi d’une séance de travail entre Alejandro Gonzales Iñárritu et son scénariste Guillermo Arriaga:
Guillermo: C’est un couple d’americanos, un de leurs enfants est muerto, alors ils partent en vacances au Maroc pour se retrouver, là ou les gens mangent avec leurs doigts et veulent tringler leur soeur ou leur chèvre. Pero, manque de bol, la femme se prend une balle perdue pendant un voyage en bus. Mucho emocion! Mais attend, ce n’est pas tout! Pendant ce temps, à la casa, leur femme de ménage mejicana qui s’occupe de leur niños, et bien elle perd les niños dans le désert !!!
Alejandro: Me gusta les coïncidences tragiques. Les US, le Mexique et le Maroc, c’est muy bien, mais c’est un peu réduit, no ? Pour appeler ça Babel, il faudrait aussi l’Asie, no?
Guillermo: Mais comment je connecte ça au reste de mon histoire ?
Alejandro: Ben no sé, c’est toi le scénariste.
Guillermo: (reflechissant longuement) Euuuuuh….
Alejandro: Alors? Dépêche-toi, mon chili con carne refroidit.
Guillermo: Ben, le fusil des marocains, ça pourrait être un japonais qui, euh, l’aurait vendu au padre ?
Alejandro: T’es pas un peu con toi ?
Guillermo: Si, t’as raison c’est de la mierda, je peux trouver mieux…
Alejandro: Quoique… Si le japonais avait une fille, en mal d’amour, MUETTE, ça pourrait ajouter à mon discours sur l’incommunicabilité! Me gusta!
Guillermo: Euh, seguro?
Alejandro: Bien sûr, en plus les bridés, ils sont coincés du cul, comme les ricains, contrairement à nous qui savons nous amuser, chico. C’est ce genre d’opposition subtiles que je compte utiliser pour montrer les différences culturelles. Caramba!
Guillermo: Euh…
Alejandro: Laisse faire l’artiste. Mange ton enchilada.
7. The Wind That Shakes The Barley (Le Vent se lève)
Palme d’Or 2006
Quelqu’un pourrait-il se dévouer pour expliquer à Papi Ken Loach qu’il est temps d’arrêter de chanter l’Internationale? Ah, et puis la caméra, il faudrait essayer de la tenir avec les mains, pas avec les pieds.
6. Lady Chatterley
5 César, dont meilleur film
Je ne vais pas mentir, je n’en ai vu que 15 minutes. Les quinze minutes de cinéma les plus horrifiantes de ma vie. Combien de temps peut-on passer à regarder des laiderons se fourrer des fleurs des champs dans les poils pubiens?
5. La Môme
Oscar de la meilleure actrice, 11 nominations aux César
MARCEEEEEEEEEEEEEEL !!!!!!!!
4. L’étrange croûtasse de Benjamin Button
13 Nominations aux Oscars
3. Pack Clint Eastwood (Mémoires de nos Pères, Lettres d’Iwo Jima, L’Échange, Gran Torino)
Clint Eastwood est un grand. Sa filmographie compte des chef d’oeuvres, comme Unforgiven et The Bridges of Madison County, et puis quelques très beaux films, comme The Outlaw Josey Wales, Bird, Mystic River ou Million Dollar Baby. Mais il est depuis le milieu de la décennie l’homme le plus surestimé de l’univers. En effet, son inspiration a beau être en chute libre, rien ne peut interrompre la symphonie de louanges critiques frisant la folie collective dont il est l’objet. Lorsque j’ai, il y a quelques mois, émis la suggestion que Le Clint serait sénile, ses fans enragés me sont tombés dessus comme la vérole sur le bas-clergé. ON NE PEUT PAS DIRE DE MAL DE CLINT, m’a-t-on expliqué. Ah ouais? Alors on se contentera de dire que son diptyque sur Iwo Jima est une monument de pomposité scolaire et soporifique. Que L’Échange est un ratage complet, plombé par une absence totale de maîtrise thématique et de fluidité narrative, et la plus spectaculaire erreur de casting du millénaire. Et que Gran Torino ressemble à un téléfilm bâclé, aussi grossièrement raconté que désastreusement interprété. Histoire de ne vexer personne.
2. Crash (Collision)
Oscar du meilleur film
Le film préféré des idiots, parce qu’il leur donne l’impression fugace d’être intelligents. En résumé: Tout le monde il est raciste, tout le monde il est méchant, TOUT LE MONDE, même Sandra Bullock, c’est dire, et même TOI !!!
Je t’ai fait PEUR, hein!
Meuuuh non, c’était du flan, en fait, au fond de leur âme, tout le monde il est gentil, même Matt Dillon le méchant flic raciste, c’est pas sa faute, c’est à cause de son papa malade qui se fait caca dessus qu’il est méchant. Mais au fond il est gentil. Et regarde, Sandra Bullock fait un bisou à sa bonne. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Tu peux te rendormir.
1. Slumdog Millionaire
8 Oscars, dont meilleur film, meilleur réalisateur, et meilleur scénario.
Une bonne vieille tambouille hollywoodienne bien dégoulinante, avec des ficelles grosses comme des câbles de télévision, saupoudrée de curry exotico-stylisant, empaqueté par des centaines de saris multicolores filmés caméra à l’épaule et montés au hachoir, puis enrubanné par un final dansé à la Bollywood sorti de nulle part, voilà de quoi donner aux touristes la sensation de goûter un plat révolutionnaire. Et déclencher une hystérie basmati de tous les diables.
Ca, c’est fait.
Maintenant, plus un mot, car les chef d’oeuvres qui suivent ne nécessitent aucun commentaire.
Introducing les dix plus beaux moments de cinéma de MA décennie.